Bang Bang Bang
On oppose trop facilement l’altruisme à l’égoïsme comme le bien au mal; si l'on définit l'égoïsme come l'attitude qui consiste à toujours se préférer aux autres, à se porter un amour exclusif, alors en effet l'opposition est radicale; mais si on le définit par le souci de soi, expression de l'amour de soi généré par la conscience de soi toujours médiée par la conscience des autres, rien ne permet d'affirmer qu'il est logiquement contradictoire avec le souci, voire le respect et l'amour des autres; vis-à-vis de l'attitude altruiste, croyant par là la valoriser, on oublie souvent que l’homme, conscient de lui-même, ne peut s’oublier tout à fait dans les actes et les intentions qui l’animent , sinon en s’identifiant partiellement ou totalement à celui ou ceux pour lequel il agit; Rousseau, nous le savons, liait étroitement « l’amour de soi » et la « pitié» envers son semblable » comme source naturelle de toute moralité artificielle socialisée. Ainsi convient-il d’ interroger le vécu des "sentiments moraux" pour dégager cette indissociation et ses effets éthiques, afin de comprendre qu’une certaine condamnation de l’égoïsme au profit d’un pur altruisme sont contre productifs, car contraire au fonctionnement du désir humain qui fonde notre être au monde et aux autres.
S. Reboul